
Août 2025, Récupérons nos standards ici, pour honorer Août 1791
En illustrant à nouveau, le périodique ‘L’Observateur’ d’Hérard-Dumesle, nous reconnaissons plus que la qualité née de Bois Caïman, dit-on, immortalisée par lui, c’est aussi récupérer en s’associant par inclusivité et en complémentarité, ce qui a fait de nous, une Nation, un État, une Patrie que nous voulons laisser aussi à nos descendants. C’est en même temps, instruire les autres villes non-capitale, dans la vie active et dynamique du pays. C’est aussi dire par la mémoire d’Août 2025, qu’Août 1791 est un besoin de réparation sous toutes les formes. Voici donc, le texte intégral de la présentation de 1819, de L’Observateur d’Hérard-Dumesle.
L’OBSERVATEUR, JOURNAL PÉRIODIQUE
- Hérard-Dumesle
- Cayes, 1819
PROSPECTUS
Un grand peintre de la nature a fait allusion du génie naissant à l’aigle qui, pour essayer son vol, commence à raser la surface de la terre avant de s’élancer dans les régions éthérées. Cette comparaison qui s’adresse aux hommes, s’applique également aux peuples. N’en doutons pas, le génie est soumis à cette loi universelle qui fait subir aux états, comme aux individus, trois périodes pour arriver à la perfection : l’Enfance, l’Adolescence et l’âge viril.
Un peuple est dans l’enfance quand, pour ainsi dire, sorti des mains de la nature, il fait ses premiers pas vers la civilisation.
Il a franchi l’intervalle qui sépare le premier du second âge dès qu’il sent l’utilité des arts, et qu’il commence à les cultiver : alors son génie se développe, s’agrandit à mesure qu’il s’éloigne de l’état primitif, et chaque pas qu’il fait dans la carrière, est marqué par un nouveau succès.
Il atteint l’âge viril quand les sciences et les arts fleurissent chez lui, et donnent l’essor à l’industrie qui, de son souffle créateur, vivifie toutes les parties constituantes de l’état.
Haïti, nous osons le dire, tient l’intermédiaire entre le second et le troisième âge.
Cette vérité ne paraîtra qu’une simple hypothèse si l’on considère la progression rapide de notre régénération. C’est en brisant les fers de la servitude, c’est au milieu des décombres et des laves amoncelées par le volcan révolutionnaire qu’Haïti, renaissant comme le phénix de ses cendres, s’est créé des institutions politiques et un ordre social. Nous avançons avec orgueil que les annales d’aucun peuple n’ont offert cette célérité d’action. L’observateur philosophe, en parcourant ces contrées, s’étonnera de retrouver le germe précieux des talents dans les individus d’une population à laquelle on refusait naguère jusqu’à l’intelligence…, mais détournons la pensée de ces êtres infectés de la lèpre des préjugés qui n’eussent été que ridicules, s’ils n’avaient produit les plus funestes conséquences,,,,, Laissons-les dans leur aveuglément, et poursuivons notre destin.
Mue par le désir irrésistible qui agite un peuple lorsqu’il sent le besoin de l’instruction des lumières de notre siècle, se porte à l’étude avec cet enthousiasme heureux fruit de l’indépendance. Ce noble élan vers la carrière littéraire reçoit un éclatant appui. Déjà des savants et des artistes viennent de toutes parts se réunir dans la capitale pour y cultiver les sciences et les arts. Ils y fondent des écoles qui, comme des pépinières régénératrices, perpétueront à jamais l’arbre sacré de la Liberté, à l’ombre duquel nous verrons éclore les lettres et les beaux-arts. Déjà plusieurs écrivains estimables consacrent le fruit de leurs veilles à éclairer leurs concitoyens dans des journaux aussi intéressants que salutaires.
Au milieu du tourbillon qu’enfante l’émulation générale, resterons-nous seuls dans une coupable naïveté ?.. Non ; nous devons aussi apporter notre tribut à la société. Pour remplir ce devoir cher à notre cœur, et céder au vœu du gouvernement et de quelques amis des lettres, nous avons formé le projet de faire paraître un nouveau journal.
Le titre d’Observateur nous a paru le plus propre au système que nous nous sommes proposé de suivre. Loin de nous l’idée de piquer l’attention par la satire, l’observateur émet ses pensées avec circonspection, parce que, dégagé de toutes passions, il voit le mouvant tableau du monde d’un œil scrutateur et tranquille. Il cherche à recueillir le fruit de l’instruction et de l’expérience des nations et des années. Si, dans ses recherches, il rencontre une de ces monuments qui portent l’empreinte du génie, il fait hommage de ses découvertes à la société : Par-là ses yeux et ses méditations servent à étendre la sphère des connaissances humaines.
Notre observateur n’a pas la prétention de s’élever si haut : comme il est des degrés qu’on ne franchit point tout-à-coup, il se bornera à ces choses qui inspirent l’intérêt du moment ; et, s’il y ajoute quelques réflexions, elles seront accompagnées de cette retenue dont le prix est l’indulgence publique.
Nous avons choisi pour épigraphe Au Temps et à la Vérité. Ces mots, simples en apparence, présentent à l’esprit les plus grandes idées. Le temps élève et abaisse les empires ; il polit et mûrit les institutions des peuples ; et la vérité, marchant sur ces traces, vient les éclairer et leur marquer le terme de leur prospérité ou l’époque de leur décadence, Haïti dont les efforts se sont constamment dirigés vers cette perfectibilité à laquelle aspire tout état naissant, Haïti attend du temps ses succès, et de la vérité le degré de considération auquel ses avantages physiques et moraux lui donnent le droit de prétendre. Ses espérances ne seront point vaines : déjà désabusée de l’erreur des préjugés, l’Europe approuve notre constante résolution, et les philanthropes de tous les pays admirent nos progrès.
Notre Journal embrassera la Littérature, l’Agriculture, le Commerce et la Politique : nous y ajouterons un article que nous intitulerons Variétés.
La Littérature étant essentiellement liée à l’art de penser, ou plutôt celui-ci formant une partie intégrante de celle-là, doit tenir ici le premier rang. Toutes les vérités importantes, les découvertes utiles sont les fruits de la pensée : si cette règle souffre des exceptions elles sont rares, et ne paraissent que de lointain, loin dans l’immensité des siècles. Nous offrirons, parfois, … lecteurs l’analyse de quelques ouvrages d’esprit : nous tâcherons de leur présenter de ces fleurs qui croissent dans le champ de la belle littérature, où l’élégance et le goût se trouvent réunis, et dans lequel l’Abeille Haïtienne va butiner, sur le thymus odoriférant, les richesses dont elle distille son miel. Nous insèrerons enfin, dans ce cadre, les productions de ces favoris des muses nés sous le beau ciel d’Haïti. Heureux si nous attirons l’attention, et si la lecture des pages de l’Observateur procure quelques délassements !
L’Agriculture d’où tous les autres arts tirent leur origine, sera ensuite l’objet de notre première sollicitude. Nous recueillerons avec un soin particulier tout ce qui lui sera précieux ; nous publierons avec enthousiasme ce qui pourra tourner à son avantage ou à sa gloire. L’invention des mécaniques destinées à épargner les bras, l’art de perfectionner la fabrication des denrées, les découvertes si utiles aux manufactures de sucre, et pourtant si négligées ; enfin tout ce qui parviendra d’intéressant à notre connaissance, et qui pourra contribuer au succès d’un art auquel est étroitement liée la prospérité nationale, sera présenté à nos lecteurs d’une manière claire et concise. Chaque année nous donnerons une idée générale de la perspective des récoltes et de leur produit.
Le Commerce est le lien universel des peuples, en établissant entr’eux un enchaînement de rapports qui identifient leurs goûts, leurs jouissances et leurs besoins. Il concourt d’une manière efficace aux progrès de la civilisation. C’est par son….. peuple apporte ses lumières, ses sciences et ses …. autre peuple, et que le monde entier se communique, son mouvement rapide entraîne les habitants des pôles sous l’équateur, et ceux de la zone torride, sous les climats glacés de l’ours : ainsi, par lui, l’homme devient industrieux et invente les prodiges des arts. Nous nous occuperons sérieusement de cette branche active de l’industrie, et nous ferons nos efforts pour donner aux commerçants des détails sur le prix des denrées et le cours des marchandises, l’abondance et la disette des places, l’indication des encans, l’arrivage et le départ des bâtiments, la nature de leurs cargaisons et de leurs chargements, enfin les nouvelles intérieures et extérieures qui intéressent le négoce.
La Politique considérée, soit dans ses rapports avec la législation, soit d’après les idées diplomatiques, à une spontanéité d’action avec toutes les parties du système social : c’est le levier puissant qui donne le mouvement, et remue en tous sens cet être moral qu’on appelle état, pose ses bases et assure sa fixité ; c’est par elle que sa force, sa puissance et sa situation relative se combinent, se mesurent ou se distribuent à l’égard des autres. On peut dire de la politique qu’elle est l’âme de l’état : elle se modifie suivant les circonstances et les pays, le caractère et les mœurs de chaque peuple. Dans les peuplades sauvages elle est ignorée ou ne s’étend pas au-delà des soins de la conservation individuelle. Leurs idées grossières ne peuvent atteindre la connaissance et l’usage de ces rapports délicats qui maintiennent l’équilibre de l’ordre social et mettent un frein aux passions : car la fin ne peut s’obtenir avant le moyen. Chez les nations civilisées, la politique est la science du gouvernement : ses abus comme ses écarts ne sont pas sans grandes conséquences. Par elle les peuples s’observent, s’évitent, ou s’allient dans la vue de leurs intérêts, et se séparent quand cet intérêt le commande. Elle concourt à la grandeur et à la décadence des états, à leur opulence et à leur misère.
Nous serions intarissables, s’il nous fallait donner à cette définition toute l’étendue dont elle est susceptible. L’article politique comprendra l’intérieur de la République, les diverses branches de l’organisation sociale, les nouvelles étrangères en tant qu’elles peuvent avoir de l’influence sur notre situation considérée sous des points de vues généraux ou particuliers : nous le terminerons par un résumé.
Dans les Variétés, nous chercherons à piquer l’insatiable curiosité en lui présentant de ces traits recueillis dans la société, et qui plaisent par l’à-propos et le brillanté. Nous en ferons hommage à ce sexe enchanteur que les grâces ont pris soin de former pour être l’arbitre du goût. Si nous, obtenons de lui ce sourire d’approbation, qui semble être le prélude de son suffrage, nous aurons atteint notre but.
L’OBSERVATEUR paraîtra deux fois par mois, et à peu près tous les quinze jours. Il sera plus ou moins étendu suivant l’abondance des matières ; cependant il ne pourra contenir moins de seize pages in-8o d’impression. Le premier numéro sortira incessamment.
…de l’abonnement, payable d’avance. Est de 25 gourdes pour l’année ; 14 Gourdes pour 6 mois, et 8 Gourdes pour 3 mois
S’adresser à M. Hérard-Dumesle, Aux Cayes.